lundi 24 août 2009

SDF bis

Je reviens sur la question de la réinsertion du SDF, qui est quand même fort compliquée.

Les barrières à la réinsertion...

La clé d’entrée dans la société, c’est apparemment l’économie, l’entreprise. Or, l’entreprise française embauche surtout des débutants et encore, avec beaucoup de difficultés, comme le montre le chômage des jeunes. Une fois que l’on est éjecté, il est quasiment impossible de rentrer à nouveau, comme le prouve le faible emploi des plus de 50 ans. Personne n’y échappe, même pas le surdiplômé, qui doit souvent créer son entreprise pour se trouver un emploi, lorsqu’il est licencié.

Plus compliqué : il y a quelques années des chasseurs de têtes rencontrés dans une mission de conseil m’expliquaient qu’ils éliminaient les CV qu’ils soupçonnaient de chômage. Les critères d’entrée dans notre société sont ritualistes, non rationnels : l’aspect, les diplômes, le contact… comptent beaucoup plus que la performance réelle, ou même la motivation, qui ne se démontrent qu’à l’usage.

De ce fait, elle fabrique l’exclusion. Elle est manifeste en ce qui concerne les SDF, la bas de la pyramide, mais le haut n’est pas épargné. Cela ne se voit pas, parce qu’il fait illusion : il est protégé par des relativement généreux régimes sociaux, la fortune de sa famille et les économies de début de carrière.

Pour reprendre une place dans cette société, il faut une double chose interdépendante : trouver des objectifs (quelque chose que l’on a envie de faire) que l’on sait atteindre ; maîtriser les moyens pour cela. Objectifs et moyens doivent être compatibles avec les règles sociales. En fait, c’est presqu’autant l’objectif que le moyen, qui pêche : appartenir à un tel monde n’a rien de très motivant.

... et comment les abaisser

Bref, je doute que les SDF puissent se réinsérer facilement. Pour cela il faut probablement que la société dispose d’autre chose que d’entreprises et d’une administration. Dans l’émission que citait mon premier billet, un SDF réinséré parlait : il avait trouvé une place dans une association qui fournissait un enterrement décent aux SDF. L’économie sociale peut-elle apporter le visage humain qui manque au capitalisme ?

Problème concomitant : en attendant, comment éviter de devenir un SDF réel ou sous-marin ? Comment éviter de perdre toute envie de vivre dans notre société ? Je pense que l’erreur du SDF est d’avoir besoin de vacances illimitées, c'est-à-dire de s’être laissé allé à une situation où sa vie n’est faite que de règles qui lui sont étrangères, à tel point que cela lui est insupportable et qu’il ne peut plus supporter aucune règle. Pour éviter cette situation, il faut probablement apprendre à imposer notre point de vue aux événements, arrêter de les subir. D’une certaine façon, il ne faut rien accepter sans discussion. À commencer par un emploi. L’employé doit autant recruter son employeur que l’inverse. La première fois que j’ai dit cela à un ami il a pensé que j’étais un dangereux théoricien. Son succès m’a confirmé dans mes certitudes.

Compléments :

1 commentaire:

Herve a dit…

Mesurer la richesse d'un pays à celle de ses SDF serait pourtant un excellent critère de classement pour nos "démocraties occidentales".