samedi 9 mai 2009

Changement en France

2 hasards convergents, me font me demander si notre pays ne se transforme pas plus vite qu’on ne le pense :

  1. Discussion avec un avocat, qui me dit que la profession est désorientée par la législation frénétique du gouvernement. Empilage de lois, mais surtout incohérence : que faire quand des lois s’opposent ? C’est la logique de l’édifice, bâti par Napoléon, qui vacille. L’équilibre des forces, fondamental pour tout système juridique, est mis en cause ; des ajouts inspirés de la Common Law anglo-saxonne font perdre toute rationalité au système.
  2. Je lis les déclarations du directeur d’une grande école française, qui veut visiblement faire de son établissement un concurrent de Harvard : quelque chose de gros (donc ouvrir en grand ses portes), un centre de recherche qui lève des fonds. Mais pourquoi ? Les universités américaines sont, justement, des universités, les grandes écoles françaises sont l’équivalent d’un département ; ces universités sont divisées en une partie « éducation » (undergraduate), qui a pour but la formation de cadres de la société, et en une partie recherche (post graduate studies), nos grandes écoles correspondent à la première fonction ; enfin les directeurs de ces universités sont des sommités internationales dont le rayonnement est équivalent à celui d’un patron de multinationale, ce qui n’est pas le cas des directeurs de grandes écoles (des anciens élèves qui ont trouvé l’entreprise inhospitalière).

Le modèle anglo-saxon est discrédité et pourtant il nous contamine comme jamais. Pourquoi ?

  • Comme je l’ai dit ailleurs, le changement est ce qu’en fait celui qui l’applique. Ce que nous voyons là n’est pas l’esprit des réformes (le gouvernement ne veut évidemment pas désorganiser le pays), mais ce qu’en fait l’administration, qui n’est pas contrôlée.
  • Le modèle libéral est formidablement efficace parce qu’il joue sur les faiblesses d’une société. Ceux qui sont frustrés par leur insuffisante réussite sociale l’entendent comme un encouragement à détruire une organisation injuste. Comme les oligarques russes, ils emploient tous les pouvoirs que leur a donnés la société pour construire un édifice à leur gloire, et la disloquer.

Tout le système public français semble partir en morceaux. Une sorte de lèpre. Va-t-on bientôt se retrouver comme dans les pays anglo-saxons devoir payer à prix d’or des services qui jusque-là étaient gratuits ? Devra-t-on avoir peur à chaque fois que l’on monte dans un train, ou que l’on entre à l’hôpital ? La femme d'un ami, qui vient d'arriver aux urgences d'un hôpital parisien : J'ai connu les urgences il y a 10 ans - ce que c'est devenu est inimaginable. Et je ne parle pas de la faune qu'on y trouve mais du système d'admission aux soins.

Mais le pire des dangers n’est pas de devenir l’Angleterre de Dickens, mais l’Afrique. Greffer une culture sur une culture incompatible produit perte d’âme et dévastation. Est-ce une maladie dont on peut se tirer ?

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