mercredi 9 juillet 2008

Serge Delwasse et résistance au changement

Serge Delwasse me semble avoir un profil paradoxal. Serge Delwasse est un dirigeant d'entreprise. Avec une particularité. Il n'a pas son pareil pour redynamiser une société. Pour la sortir de ce qui est ou menace d'être un cercle vicieux dangereux. Il y parvient en faisant ce qui semble l’opposé du bon sens le plus évident. Par exemple, une entreprise est au bord de la faillite, il augmente les salaires de ses employés.

  • Ce n’est pas sa capacité à avoir une vision systémique qui m’intéresse ici, mais le fait qu’il semble être le type de dirigeant pour lequel l’entreprise française est bâtie et que l’enseignement français ne fabrique plus : le « dirigeant de droit divin ». Qu’est-ce ? C’est Napoléon, un dirigeant qui à la fois sait où aller, et comment y aller. Il n’utilise pas les techniques qui font le gros de mes livres. Il regarde ses collaborateurs dans les yeux et leur dit ce qu’ils ne voulaient pas entendre. Sa persuasion, et sa connaissance des ressorts humains, fait qu’il est convaincant et qu’on le suit.
  • Serge Delwasse m’a aussi amené à réfléchir à la résistance au changement. Je crois qu’il y en a deux types :

  1. Le premier est un test. C’est lui qui fait tomber les gouvernements. Le Français veut savoir si celui qui veut le changement est déterminé à le mener à bien. En quelque sorte, il procède à un tir de semonce (par exemple, il organise une manifestation). Si le leader du changement tient bon, le Français comprend qu’il est sérieux. Sinon il a bien fait de ne pas bouger.
  2. Le second correspond à une résistance véritable. Pour le comprendre il faut avoir recours à ce que je nomme le « grand théorème du changement », le résultat théorique le plus important en ce qui concerne les techniques de changement. Celui que vous devrez avoir retenu quand vous aurez tout oublié. Voici de quoi il s’agit : pour que l’homme (ou le groupe humain) change, il faut qu’il y ait « anxiété de survie ». On l’obtient par la menace ou la stimulation. Mais l’anxiété de survie ne suffit pas, ou rarement. Car se développe avec elle « l’anxiété d’apprentissage » : l’homme ne voit pas comment il va faire pour changer. Pour le faire bouger il faut abaisser cette anxiété d’apprentissage (sans réduire l’anxiété de survie). Comment ? En aidant l’homme non à trouver la solution à ses problèmes, mais la méthode qui lui semble adaptée à leur résolution. Pour cela, il a besoin d’un « donneur d’aide ».
  • Serge Delwasse est dubitatif. Certains employés sont des cas désespérés. Ils ne trouveront jamais la méthode qui leur permettra de réaliser ce qu’on attend d’eux. C’est vrai, mais alors il faut faire ce qu’il fait : les placer là où leurs compétences sont adaptées. C’est aussi ça l’art du donneur d’aide.

Références :

  • Pourquoi l'organisation résiste au changement : Qu’est-ce que la résistance au changement ?
  • Sur le dirigeant pour lequel l'entreprise française est conçue : IRIBARNE (d’), Philippe, La logique de l’honneur, Seuil, 1993.
  • Les anxiétés viennent d’Edgar Schein : SCHEIN, Edgar H., The Corporate Culture Survival Guide, Jossey-Bass, 1999.
  • De même que le « donneur d’aide » : SCHEIN, Edgar H., Process Consultation Revisited: Building the Helping Relationship, Prentice Hall, 1999.
  • Pour une autre personne qui semble avoir le profil du « dirigent de droit divin » : Christian Kozar et le Reengineering de l’économie ...

1 commentaire:

Herve a dit…

Autre dirigeant de droit divin, un certain Nicolas S., mais sait-il vraiment ou il va?

Sympa de retrouver Serge sur ton blog, it's a small world.