samedi 5 juillet 2008

Droit naturel et changement

Reprise de la discussion précédente.

En fait, il n’y a pas que les philosophes qui parlent de droit naturel. Il y a aussi les scientifiques des organisations. Ce qu’ils disent a une importance pratique pour le changement.

Tout groupe humain est dirigé par sa culture. Un ensemble de règles, implicites ou explicites, oriente le comportement de chacun de ses membres. Exemples : le code de la route, ou les usages de la politesse. Quand ces règles sont efficaces, nous sommes « heureux », c'est-à-dire que nous savons atteindre les objectifs que nous recommande la société (nous marier, travailler, avoir des enfants, partir en vacances à la mer…). Si ce n’est pas le cas, nous sommes « déprimés », ce qui est l’exact équivalent de ne pas être capable de faire ce que l’on désire. Émile Durkheim parle « d’anomie » : il y a un défaut dans la trame des règles qui nous soutiennent.

Conduire le changement, c’est rendre une culture efficace. C'est-à-dire lui apporter les règles qui lui manquent. Comment juge-t-on qu’un changement a réussi ? Lorsque les membres de l’organisation qu’il concerne sont « heureux ». L'expérience montre une transformation brutale de l’attitude humaine avant et après un changement. Attention : le changement peut amener l’organisation vers une situation plus ou moins durable. Le bonheur peut n’être que passager.

Qu’est-ce qui rend les organisations malheureuses ? Un désir qu’elles ne savent pas assouvir (par exemple Boeing a eu beaucoup de mal à faire voler le 747) ou une évolution de leur environnement à laquelle elles n’étaient pas adaptées (augmentation massive du prix de l’énergie). Ce dernier cas est un résultat naturel de la « destruction créatrice », elle-même un avatar du mécanisme d’évolution décrit par Charles Darwin.

Avons-nous trouvé une réponse à la question du « droit naturel » ? Ce que semblent dire ces travaux (et mon expérience) est que toute organisation a ses règles, et que ses membres doivent les suivre sous peine de nuire à l’ensemble, et à leur propre intérêt. De même que l’on roule à droite en France, et pas à l’ombre. Cet édifice a une importante capacité d’évolution (effet de levier), à condition d’inscrire le changement dans la logique des règles préexistantes. C'est-à-dire de ne pas vouloir appliquer un modèle théorique.

Il y a donc des lois plus ou moins absolues et plus ou moins relatives. La première d'entre elles est l’évolution, et le fait que l’on y résiste mieux à plusieurs que seul. L’homme est essentiellement un « animal social ». Une fois dans un groupe, les règles du groupe deviennent absolues : pas question de rouler à gauche en France. Mais les règles d’un groupe sont, jusqu’à ce que la sélection naturelle ait dit le contraire, aussi bonnes que celles des autres groupes.

La fusion de deux groupes, entreprises ou communautés, pose un intéressant problème. De deux absolus incompatibles il faut en créer un unique. L’expérience de la fusion d’entreprises montre que l’opération ne se fait pas par compromis, mais en créant de nouvelles valeurs, au dessus des valeurs des groupes concernés (cf. constitution d'une nation et Deutschland über alles). C’est ainsi que l’on a réussi à réunir des religions qui se sont haïes.

Références :

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